Accueillis en résidence d’écriture dans le cadre de la 10ème édition du festival Terres de Paroles « Osez Flaubert ! » en 2021, Cathy Ytak, autrice de romans (jeunesse et adulte) et traductrice littéraire, et Thomas Scotto, auteur jeunesse, se sont installés au collège Gustave Flaubert à Duclair pour un projet consacré à l’éducation sentimentale et à l’émergence de l’amour. Apprentissage à la fois difficile et complexe, joyeux et inquiétant mais aussi terreau fertile pour mettre des mots sur ces sentiments agités et réussir à les exprimer à haute voix.
De cette résidence à quatre mains est né le texte Les deux saisons d’Avril, dans lequel trois adolescents, Clara, Swan et Avril, vont faire leur « éducation sentimentale »…
Avertissement : le texte est destiné à un public avisé de plus de quinze ans.
Note à l’attention des comédiens : les scènes 1,4 et 11 sont du dialogue entre Swan et Clara.
Toutes les autres scènes sont des adresses au public.
Un soir, dans un restaurant…
1.
SWAN : « Je ne veux personne le jour de mon départ », c’est ce qu’elle a dit…
CLARA : Et bien moi, je ne l’ai pas crue.
SWAN : On parle d’Avril, Clara, … A-vril.
CLARA : Justement, elle partirait quand même pas sans nous dire au revoir ! Elle va venir. Elle connaît le restau…
SWAN : Ce que je vois, c’est qu’Avril elle s’en va comme elle est arrivée. Point.
CLARA : Je sais, mais c’est dégueulasse… Elle débarque comme ça en milieu d’année, elle met le bazar partout, et hop, tour de piste terminé, elle se casse.
SWAN : Peut-être, mais elle nous a jamais menti. Sur ses parents, sur leur boulot, tous leurs changements de pays, tu sais bien…
CLARA : Merde, Swan… à 17 ans, elle est plus obligée de les suivre !
SWAN : Eh… on parle d’une mission à Taïwan, pas de vacances à Vierzon… ! Ta grande aventure, c’est peut-être d’avoir déménagé ta chambre au sous-sol, mais tes parents sont toujours au-dessus, non ?
CLARA : Oui, et alors ? Ce que je vois, moi, c’est qu’on va finir le lycée sans elle… J’avais pas envie qu’elle parte. Et pas comme ça, c’est tout. On avait plus ou moins dit qu’on se retrouverait ce soir, non ?
SWAN : Je suis d’accord mais… elle est pas là. Et Avril manque déjà, c’est con…
CLARA : Dis pas ça, Swan, peut-être que…
SWAN : Peut-être que rien du tout ! Tu le sais bien. Je le sais bien. Elle ne viendra pas.
2.
SWAN : Le premier jour d’Avril, enfin la première fois où l’on s’est parlé vraiment tous les deux, ce n’était pas longtemps après son arrivée au lycée. La prof avait pourtant oublié de la présenter mais nous, forcément, on l’avait remarquée. Et ce n’était pas le simple charme de la nouvelle qui remue les habitudes de ta classe, non, quand Avril a passé la porte, je crois qu’on a été plusieurs à s’être redressés sur nos chaises, les filles comme les garçons mais sans pouvoir l’expliquer vraiment.
Seulement, pour mon premier jour d’Avril j’étais au pire endroit possible. Plutôt, le plus exposé qui soit : La piscine municipale.
Pour d’autres un lieu de plaisir, pour moi, le véritable chaudron du diable, à seconder ma mère dans son boulot parce que tous les agents d’entretien étaient tombés malades et au même moment. Au téléphone elle m’avait dit : « Allez, juste pour cette après-midi, j’ai besoin d’aide », et il a fallu que ce soit celle-ci, précisément…
Donc, je viens d’arriver alors que ça n’était pas prévu. Je suis du côté des cabines et je fais exactement ce qu’on me demande : j’installe le magnifique panneau jaune « Attention sol glissant ». Étrangement, il y a peu de monde. Le bruit de quelques douches, celui d’une ou deux portes qui claquent et soudain… Avril.
Cette fille, la nouvelle qui me surprend :
– Swan ? Excuse-moi, le code ne marche pas…
– Pardon ?
– Le code ne marche pas. Pour le casier. Ça fait trois fois que j’essaie et… rien.
Sur le moment, ce n’est pas tellement l’histoire du code que je ne capte pas mais mon prénom. Je sais mon prénom… mais dans la bouche de cette fille qui ne me connaît pas, qui n’est pas censée me connaître, qui ne peut pas me connaître… ça ne colle pas.
– C’est bien Swan ?
– Euh… oui, enfin, carrément… oui !
– Je suis plutôt forte pour « retenir » alors… ça m’aurait piquée de me tromper, tu vois !
Elle est en maillot de bain, deux pièces. Quelque chose de neutre mais joli modèle. Tellement de cheveux roux sous le bonnet que la plupart s’échappent jusqu’à ses épaules. Et elle se souvient de mon prénom…
Très vite, je sens qu’elle s’impatiente. Pas d’être en maillot devant moi, visiblement… oui, elle grelotte un peu, c’est sûr, mais ce n’est pas ça. Elle me balance :
– Et donc ?
– Quoi…
– Tu as une solution ou je le fais exploser, ce casier ? Parce que j’ai quelques techniques venues de Colombie… de Medellin. Enfin d’un quartier de Medellin. Plutôt efficaces !
Mon cerveau n’arrive pas à la suivre. Il panique, même… Le second degré, d’accord, mais seulement si j’arrive à le prévoir ! Alors je bredouille simplement :
– Bah, j’ai un passe. Ça ouvre tous les casiers justement.
Elle fait semblant de rattraper sa serviette, de justesse, m’offre un petit silence et son sourire :
– Parfait… !
Et c’est là que je suis obligé de me retourner, vers elle, complètement.
J’ai bien bataillé avec ma mère pour mettre un jogging mais je porte aussi un maillot de bain. Plus réglementaire.
Et Avril est là, à ce moment critique.
Celui où ma peau se rappelle à moi, douloureusement.
Je me dirige vers son casier et je vois son regard qui descend sur ma jambe. La droite. Ma détestée. Elle ne demande pourtant rien, son visage ne montre aucun dégoût, à peine un petit étonnement. Elle ne demande rien, simplement elle constate, mais j’éprouve le besoin de préciser, d’expliquer. Une manière de défi.
– Brûlure… quand j’avais six ans. Eau bouillante. Tout le côté droit, en fait. Ça remonte jusqu’à l’aisselle et ça prend une partie du bras.
Puis je me tais. Une analyse médicale extraordinaire. Tant de sensibilité pour si peu de nuances… vraiment je suis un garçon qui vaut le coup. Si je pouvais m’enfuir sans m’étaler sur le sol détrempé, je le ferais. Heureusement, Avril me retient.
– Merde, t’as dû sacrément morfler. Peut-être encore aujourd’hui… ?
– Non, ça va mieux.
Je tente de mentir pour reprendre la main. Avril enlève entièrement son bonnet de bain et hoche la tête.
– Ok… J’ai pas d’autres mots ! Je pense surtout qu’en face, on n’a pas de mots pour un truc pareil. Ressentir, on ne pourra jamais…
Bien sûr elle a raison.
Pourtant, dans l’odeur du chlore et la moiteur de l’air, je me suis dit : d’accord, toi t’es le genre de fille qui doit aimer tout le monde. Et ça va servir à quoi que tu te souviennes de mon prénom ? Aussitôt, je m’en suis voulu d’avoir pensé ça parce qu’Avril avait été impeccable. Simplement sublime. Et, après des années à me cacher des autres, j’ai eu l’impression d’avoir été percé à jour.
3.
CLARA : Avril venait juste d’arriver. La prof de français n’a pas fait d’exception. Elle avait prévu cet exercice-là, et il était pour tout le monde :
« Quel est le lieu que vous aimeriez partager, ce week-end, avec quelqu’un qui ne connaît pas votre région ? En trois lignes, donnez-lui envie d’y aller ».
Peut-être une façon comme une autre de l’intégrer…
Il y a eu des ricanements dans les rangs, et des réflexions du genre : « Le Burger du coin, on peut ? ».
Mais moi, j’ai su tout de suite. Et ça se résumait à : « Prendre le bac pour traverser le fleuve, et revenir à l’heure exacte où le soleil se couche (à 18 h 11, samedi) ».
Dans la classe, ils ont ri de la précision. De l’idée incongrue. De ce truc de gamine. C’est sûr, ça ne valait pas l’ascension en montgolfière, l’accrobranche d’Iris ou le Mortal speed de la fête foraine…
Pourtant, c’est vrai, cette traversée du bac, c’est mon petit plaisir du soir.
Depuis toujours, j’habite en face de l’embarcadère.
On était samedi. Il pleuvait, je regardais par la fenêtre. Et là…
Dans ce paysage familier et tranquille, d’un coup, il y a eu Avril.
Avril !
Je crois que j’ai crié son nom derrière la vitre.
J’ai dit : « Je sors ! » Mes parents étaient occupés et personne ne m’a entendue. Je ne comprenais pas ce qu’elle fichait là…
J’ai remonté la rue en courant, au milieu des voitures.
– AVRIL !!
J’ai hurlé. Elle s’est retournée.
J’étais essoufflée.
– Mais qu’est-ce que tu fais là ?
Le rire d’Avril.
– J’attends le bac pour le coucher de soleil de 18 h 11.
J’ai cru, un moment, qu’elle se moquait de moi. Mais rien dans ses yeux ne disait ça. Juste un sourire, une jubilation, l’attente de l’affaire du siècle.
Là, sincèrement, j’ai flippé.
Ce bac… c’est deux minutes de traversée. Il n’y a que moi pour en faire une croisière en haute mer. Et avec la pluie… le gris…
On nous a laissées monter. Elle est allée parler à un des marins, comme ça, direct. Moi, je n’ose pas parler aux gens que je ne connais pas, et je me sentais un peu triste. C’était tellement ridicule, cette traversée…
Sans doute, Avril a capté. Elle m’a dit : Quand j’étais à Istambul, j’ai souvent sillonné le Bosphore, au coucher du soleil.
J’ai plissé les yeux. J’avais envie de chialer. Et envie de crier : Pourquoi t’es venue ici ? Mais elle ne disait plus rien. Le bac a quitté la rive. Il avait cessé de pleuvoir, le soleil a percé les nuages et, brusquement, le ciel s’est embrasé.
J’ai regardé Avril, appuyée au bastingage. Sur son visage, il y avait de la joie. Un truc simple, mais pas triché. Pas triché. Une vraie joie. Elle s’est tournée vers moi. Elle m’a parlé de beauté, partout, quand on sait la voir. Ça m’a touchée.
Deux minutes de trajet vers l’autre rive, et retour. Le temps qui s’étire à l’infini, presque suspendu.
– T’as vu plus beau, non ?
– Non. Ça se compare pas, la beauté ! Et puis, quand on sait ce que les gens aiment, on les connaît déjà un peu mieux.
J’aurais pu lui demander : Pourquoi moi ?
Elle aurait pu me répondre : Parce que toi.
Mais au lieu de ça, elle m’a expliqué très vite que, dans sa vie, il fallait toujours qu’elle se dépêche, qu’elle n’avait pas le temps pour les hésitations, ni pour les choses, ni pour les gens.
Je ne sais pas si j’ai compris, mais ça m’a rassurée.
Il faisait presque nuit quand on est descendues du bac. On souriait toutes les deux. La brume avait mis de l’eau sur nos cheveux.
4.
SWAN : T’as reçu un message ? Est-ce qu’elle t’a appelée ?
CLARA : Un appel ? Tu sais qu’Avril et le téléphone…
Swan : Parce que j’ai manqué de temps. Avec plus de temps ? Les nouvelles technologies, elle aurait adoré ça ! Je l’aurais convertie !
CLARA : Convertir Avril, t’as vraiment pris la confiance.
SWAN : Vérifie quand même… C’est souvent toi qu’elle appelle en premier.
CLARA : Mais non, Swan, j’ai rien reçu. Et puis j’ai faim, là… Je vais commander.
(On entend les bruits du restaurant) )
SWAN : Tu te souviens, la première fois qu’on s’est retrouvés tous les trois pour un cinoche ? Elle est arrivée en retard et elle s’est trompée de séance… Non, elle ne s’était pas « trompée »… elle avait juste préféré le film d’à côté.
CLARA : Je m’en souviens.
SWAN : Et en plus, on a fini par la rejoindre !
CLARA : Voilà, c’est exactement pour ça que je la déteste ! On a toujours envie de la suivre, c’est révoltant ! Ça vaut bien une pizza avec de la moutarde !
SWAN : Et deux pintes !
(On entend des bruits de verres)
SWAN : J’avais aimé ce film. Franchement aimé. Tout seul je serais pas allé le voir mais… mais vous avez tellement ri toutes les deux ! C’est pas concevable de rire comme ça ! C’était indécent ! Avoue !
CLARA : J’avoue.
SWAN : Heureusement, on a pleuré tous les trois au même moment…
CLARA : ÇA c’était indécent ! Tes chutes du Niagara, tes sanglots jusqu’au tram…
SWAN : Eeeh… ! Je suis un garçon sensible… Le monde change, Clara, les hommes, les sauvages, les peaux de bête, tu veux qu’j’ t’apprenne ? !
CLARA : Enfin, question indécence, c’est Avril qui a toujours gagné. Et haut la main !
SWAN : Exemple ?
CLARA : Ben, le jour de la petite culotte, par exemple. Moi, si je me trompe de taille de pantalon, jamais je ressors de la cabine d’essayage les fesses à l’air… En petite culotte ! Elle a quand même traversé tout un magasin en petite culotte !
SWAN : Oui, ça c’est bien elle… Du coup, il y a une chose autour de laquelle on se retrouve : faut de l’endurance avec Avril !
CLARA : Une chose ? C’est peut-être pas la seule chose…
5.
SWAN : En tout cas, la première chose marquante pour nous trois… Avril était là depuis, quoi, un mois ? On se connaissait finalement très peu…
CLARA : On avait à peine eu le temps de s’apprivoiser… Mais, oui, ça faisait un mois qu’elle était là. Swan et moi on s’était donné rendez-vous avec Sinah, Iris et Martin pour préparer l’anniversaire de Clémentine. Les courses avaient duré des plombes.
SWAN : Comme en primaire : des assiettes en cartons, des gobelets, des kilos de bonbons… l’alcool en plus.
CLARA : Le temps de tout mettre dans la voiture d’Iris, et on s’était fait lâcher par le groupe. D’un seul coup, plus personne !
SWAN : Et on serait rentrés chacun de notre côté si on ne s’était pas pris cette tornade. Directe. Juste derrière nous. La voix d’Avril, tonitruante : « On se connaît non ? ».
CLARA : Elle nous a enlacés en rigolant, nous a embarqués sur quelques mètres. Pas le temps de répondre, pas le temps de réagir et, juste avant de nous quitter, elle a fait ce truc qu’on ne pouvait pas prévoir…
SWAN : Nous embrasser. Sur la bouche. Tous les deux.
CLARA : On était un peu sur le cul. Mais elle a enchaîné : « Et traînez pas trop, j’vous surveille les amoureux ! » Ça a été sa conclusion.
SWAN : On s’est regardés avec Clara, j’ai haussé les épaules. On se connaissait peut-être depuis longtemps mais : « Non, non, pas amoureux ! » Ça a été ma précision. Et c’est drôle, le lendemain, à l’anniversaire de Clémentine – j’imagine, on en mourait d’envie -, on n’a pas reparlé d’Avril. De ce truc anodin… je veux dire, un baiser sur la bouche. Pourtant, je suis sûr, j’attendais déjà lundi pour savoir si elle recommencerait. Nous embrasser encore.
CLARA : Moi, je me demandais juste ce que ça voulait dire.
SWAN : Mais le lundi rien. Avril nous connaissait toujours, bien sûr, mais pas d’aussi près que la veille. Je lui ai souri, beaucoup, à Clara aussi…
CLARA : Tout a continué pareil, les cours, les interclasses et le self. Pourtant, quelques jours plus tard, quand le prof de SVT a demandé qu’on travaille en groupe sur la Photolyse de l’eau, Avril a décidé qu’un groupe, c’était trois.
SWAN : Nous trois. On avait juste une semaine pour rendre quelque chose de très intelligent et pas envie de bosser chez les unes ou les autres. Non, un lieu neutre.
CLARA : La prof doc était absente, on ne savait plus depuis quand, et dans la classe, personne d’autre n’avait pensé au CDI.
SWAN : Et ça n’a pas pris deux secondes pour amadouer la vie scolaire. Je ne pensais pas qu’on nous donnerait les clés mais, un sourire d’Avril et…
CLARA : Un sourire d’Avril, ça ouvre toutes les portes.
SWAN : Un peu moins facilement quand il y a autant de clés sur le trousseau !
CLARA : On les a toutes essayées, trois fois. Agglutinés autour de la serrure, on voulait être discrets et c’était plutôt raté !
SWAN : Et, finalement, c’est moi qui ai trouvé la clef. La bonne. Le Graal. On a jeté nos sacs sur la première table venue. On a fait comme si on savait chercher entre les étagères. J’ai foncé à la lettre « P » pour Photolyse et je suis tombé nez à nez avec Proust. Je crois que Clara et Avril se sont moquées, un peu. On a repris nos sacs pour aller plus loin. Plus loin encore, jusqu’à la salle des ordis. C’est drôle, comme si on voulait s’éloigner des regards.
CLARA : Et, là, on ne sait plus qui a commencé en premier…
SWAN : … Personne en particulier, finalement. Tous les trois on s’est rapprochés, un tremblement jusque dans nos respirations et, on s’est embrassés. Embrassés vraiment. Nos mains se sont glissées sous les vestes et les blousons, des tonnes de vêtements. Elles n’ont pourtant pas trouvé la peau. Clara, Avril, moi, nos ventres, nos poitrines, mon torse, heureusement pas ma peau… nos sexes, à travers le tissu, excités, nos langues au creux de nos oreilles… J’ai pensé, je suis en train d’embrasser Avril que je ne connais presque pas. Je suis en train de toucher Clara et ça m’était jamais venu à l’idée avant.
CLARA : Ça s’est fait en douceur, et c’est arrivé… ce désir commun.
D’instinct, on n’avait pas allumé la lumière.
6.
SWAN : On a compris tout de suite qu’on n’en resterait pas là. Qu’on en voulait plus. Le CDI avait ses limites, surtout côté intimité.
CLARA : Moi, ça me dépassait un peu. Bien sûr, j’avais déjà vécu des choses… Ma première fois avec Anton, l’année dernière dans le van de ses parents. Forcément une première fois, ça compte… Ou avec Lucas, aux vacances de Noël. Là, c’est moi qui avais pris l’initiative. Il était juste de passage, et c’était bien.
Mais au CDI avec Swan et Avril, c’était plus intense que tout ça… L’envie. L’envie d’aller plus loin ensemble. Même avec Swan… Et c’est étrange parce que, Swan, je ne l’avais jamais vu comme un mec possible. Trop copain depuis longtemps, peut-être. Mais là, Avril venait de tout chambouler. Alors… On ne savait pas quand, on ne savait pas où, mais c’était une évidence.
SWAN : Pas à l’hôtel : trop glauque. Pas de Airbnb : trop cher. Pas dans nos familles. Non, un lieu où on ne serait pas dérangés. Rien que d’énumérer cette liste… c’était fou de penser que, concrètement, on cherchait un lieu pour baiser ! Ça ne m’était jamais arrivé.
CLARA : En tout cas, c’était pas Avril qui pouvait s’en charger. Elle ne connaissait pas encore assez la ville.
SWAN : Pas dehors : mois de mars oblige. Chez un pote : impossible. Décidément, il fallait que ça reste entre nous. Quoiqu’il arrive : surtout pas nulle part ou jamais.
CLARA : C’est là que j’ai pensé à ma soeur. J’étais conne ! Elle avait gardé son studio après son mariage. Et je pouvais y aller pour bosser au calme. Il était pourtant tout près du lycée mais j’y avais jamais mis les pieds.
SWAN : Et on s’est décidés. Ce serait après l’anniversaire de Clémentine. Mardi. De 13h à 15h. On avait perm.
7.
CLARA : On s’était dit : on n’a que deux heures, faut pas traîner. On a quitté le lycée et couru sous la pluie jusqu’au studio, grimpé l’escalier en colimaçon, à la fois pressés et excités. Les doutes ? Je les laissais de côté.
Avril avait déjà enlevé ses vêtements en riant et se dirigeait vers la douche, complètement nue, et soudain… Soudain elle fait demi-tour et revient vers moi. Elle m’attire vers elle, commence à enlever mes vêtements trempés. Je tremble sous ses doigts. Son corps, ses rondeurs, le galbe de ses hanches… Jamais jusque-là je n’ai été attirée par les filles, le corps des filles. Et de ce désir pour Avril, je n’en reviens pas. Collée à elle, je fourre ma tête dans son cou, me gorge de son parfum, de la douceur de sa peau, du soyeux de ses cheveux roux, c’est rassurant. Swan, lui, a mis les draps sur le canapé et ne s’est pas déshabillé. Moi, pour sa peau, je sais. Est-ce qu’il lui en a parlé ? Brusquement Avril m’entraîne sur le canapé. Puis elle fait un geste vers Swan, très tendre. Les mains refermées sur sa nuque, sa langue sur son menton qui remonte jusqu’aux lèvres… Peut-être qu’il y a du désordre dans nos mouvements, nos halètements, nos respirations. Des hésitations, souvent. Le corps de Swan… c’est comme si je le regarde pour la première fois, et le désir est là, impérieux. C’est nouveau entre nous, troublant, infiniment. La chaleur de nos corps nus nous rapproche et nous soude. Dans ma paume, le sexe de Swan durcit encore tandis que la pointe des seins d’Avril roule entre mes lèvres. Morsure douce inconnue, gémissements, petits cris. Nos ventres se tendent, nos mains s’aventurent, fébriles. Elles défrichent, hésitent encore, découvrent. Nos odeurs, nos transpirations s’entremêlent.
« Tu veux bien ? » La tête d’Avril trouve sa place entre mes cuisses écartées. De la chaleur, toujours plus. Le plaisir monte comme un incendie, je m’embrase. Je glisse une main sur les fesses de Swan qui frotte son sexe bandé contre mon ventre. Je le trouve très beau. Je jouis en criant, et m’étrangle en toussant. On rit. Avril et Swan se caressent encore et je les regarde, les yeux mi-clos. Je pense : c’est notre première fois, et on n’aura jamais assez de toute une vie pour se connaître, pour faire tout ce qu’on peut faire avec trois corps et six mains, et c’est génial.
Quand je tourne la tête vers la pendule sur le mur du studio, je vois qu’on a, largement, loupé la dernière heure de cours.
8.
SWAN : Clara s’est mise sur la pointe des pieds pour remettre la clé dans le petit boîtier prévu. Puis, on a redescendu l’escalier. Je ne sais plus très bien dans quel ordre. Mais étourdis, ça oui, complètement étourdis ! Comme si on était encore nus et sillonnés de plaisir.
L’averse un peu plus calme qu’à notre arrivée. Tout s’est passé si vite, finalement. Dans une urgence électrique. Quelque chose de l’ordre du torrent. Est-ce qu’on venait vraiment de faire l’amour ? Est-ce que les filles le diraient de cette manière-là ? Je refais le chemin dans ma tête…
Et, ce que j’aime immédiatement, c’est le côté clandestin de notre histoire.
Comment Avril et Clara se retrouvent nues bien avant moi. Et moi, toujours ruisselant, à chercher des draps pour les jeter sur le canapé immense, à intégrer que ce serait ici, notre forteresse, notre premier point d’impact, à les regarder s’embrasser, plus franchement, plus langoureusement, la peau d’Avril si blanche par rapport au doré de Clara, à bander déjà… et à me déshabiller, enfin. Mais qu’est-ce que venait de déclencher Avril pour que j’ose être nu devant elles, elles deux… Que j’ose le faire avec Clara, aussi. Parce que ça y est, nous y sommes…
Je frotte mes mains contre mes jambes pour les réchauffer. Je veux caresser Clara, je veux découvrir Avril. Je ne veux pas aller trop vite. Je ne veux pas faire mal. Pourtant mes doigts cherchent. Longtemps. Ils frôlent et se rapprochent, frôlent encore, ils entrent. Et j’aime sentir l’humidité de leur excitation ou le mélange de leurs salives. J’ai envie de goûter à tout. Je veux être là entièrement pour elles. Et leurs seins me troublent. Si différents. À la fois tendus et pleins, si veloutés. Je lèche, je fais tourner ma langue et c’est brûlant et c’est sucré. Un peu susceptible au bout…
Après, à quel moment Clara me prend dans sa bouche ? Quand la langue d’Avril me fouille et me dévore ? Je sais que je pousse un petit cri, plus aigu que prévu. Parce que tout ce chaud… tout ce chaud autour de ma queue. Et son regard… je deviens combustible. J’aimerais ne pas frissonner au contact des mains sur ma cicatrice, décidément interminable. Et puis je n’y arrive pas. Alors quand le visage d’Avril disparaît entre les jambes de Clara, je m’allonge près d’elles, le sexe dur, insoupçonné. Je me caresse en les regardant. Elles sont si désirables. Mais je ne tente rien. Rien de plus avec elles. Soudain, il y a le plaisir de Clara. Un joli râle. Le mien est proche. Je crois que je vais venir mais Avril part du bout du canapé. Elle met ses mains sur mes chevilles, elle remonte petit à petit sur mes jambes comme on fait l’ascension d’une colline. Déjà, c’est très excitant. Et, arrivée à mon sexe, elle souffle délicatement dessus. Un courant d’air, léger. Mon cerveau a le réflexe de me faire rire, mon sexe, lui, frissonne d’une chaleur dingue. Il se gonfle encore. Tout le sang de mon corps au même endroit. Et c’est comme ça que je jouis. Sur mon ventre. Entouré d’elles.
Au pied de l’escalier. Je refais le chemin dans ma tête. Il n’y a pas eu de pénétrations. Pourtant je sais que nous avons fait l’amour. Et puis je leur dis dans un soupir que… »En fait, c’était tout nouveau pour moi ».
9.
SWAN : Est-ce que les autres ont su ? Pour cette première fois. Est-ce que ça se lisait sur nos visages ? Moi, j’avais l’impression que je ne souriais pas pareil. Sans doute, un petit peu plus idiot.
Pourtant, dans les couloirs du lycée on n’était pas si différents et pas toujours ensemble.
CLARA : Mais le faire avec Swan, avec Avril… à trois… Moi j’avais pas prévu ça.
SWAN : Bon, c’était pas faute d’avoir regardé des pornos. La tête dans tous les sens pour bien comprendre les positions. Mais là, je l’avais vraiment fait, et avec deux filles. Et ça n’avait rien à voir.
CLARA : Et décidément, le faire avec une fille… enfin, pas n’importe quelle fille ! le faire avec Avril. Cette première fois, c’était incroyable.
SWAN : Aussi bien avec Avril qu’avec Clara, on était dans ce qu’on faisait, des moments sans réfléchir, à profiter. C’était joli.
Parfois je suis resté à l’écart, je ne suis pas sûr d’avoir toujours bandé…
CLARA : On a sûrement été maladroites…
SWAN : Heureusement, y avait rien d’imposé.
(Silence)
SWAN : Après on s’est plutôt bien organisés… à tour de rôle chez l’infirmière pour quémander un ou deux préservatifs puisque le distributeur du lycée est en toujours panne !
CLARA : Et c’est toute une histoire qui s’est installée. Toujours dans le studio de ma sœur. Une histoire de peau. De désir. Juste de désir.
SWAN : De plaisir aussi.
CLARA : J’ai aimé voir Swan avec Avril.
SWAN : Une seconde fois plus vaillante… plus rassurée. J’étais allongé sur le dos et j’ai tendu la main vers Avril. Elle a souri. Elle est venue sur moi. Et puis, elle s’est cambrée, ses hanches ont cherché l’angle exact, le bout de mon sexe déjà un peu en elle. On a cherché encore et c’est moi qui suis entré. Lentement mais complètement. Avril a eu un petit soupir, un petit cri. J’ai posé une main sur son ventre et les mouvements de mes fesses ont fait le reste. Je ne voulais pas qu’Avril m’aide, je voulais qu’elle reste en apesanteur. Mon sexe, en elle… son sexe sur le mien…
CLARA : Un jour, en mai, il faisait tellement chaud, on est simplement restés nus. On n’avait pas envie de faire l’amour. C’était doux de se caresser et de lézarder tous les trois sur le canapé.
La fois d’après, on a commencé sous la douche avec Swan. On était super excités. Il ondulait, son sexe contre mes fesses. Je mouillais. Je mouillais même sous la douche. Avril nous a rejoints. La main d’Avril entre mes cuisses, les doigts pointés vers mon sexe qui cherchaient leur chemin entre les poils, et glissaient jusqu’au clitoris. J’ai gémi de plaisir. Les bras de Swan se sont refermés sur nous deux.
SWAN : De toute manière, c’était tous les trois. Une fois, j’avais une heure de conduite… pile à l’heure de l’amour. Les filles ont dit spontanément : « On décale ».
CLARA : On a dit aussi : « Ce préservatif, fallait pas l’ouvrir avec les dents. Si on pouvait éviter la pilule du lendemain… »
SWAN : On a essayé des choses, on s’est surpris, on s’est appris mutuellement. En prenant le temps. Mais le jour où Avril s’est mise à pleurer… comme ça sans prévenir alors qu’avec Clara on voulait être là, rien que pour elle… on a pas compris. On a pensé qu’on avait merdé, un geste déplacé, le truc de trop…
CLARA : On a tout arrêté.
SWAN : Avril a repris son souffle : « Tout va bien, vous inquiétez pas, tout va bien ». Mais il lui a fallu encore du temps pour nous dire que, cette fois-là, elle avait joui plus fort. Si fort, quelque chose d’incontrôlable.
CLARA : À partir de là, on s’est dit qu’il fallait se parler. De nos émotions qui débordent et puis de ce qu’on aimait, de ce qu’on n’aimait pas…
SWAN : Genre, ça serait bien qu’on arrête de me mordre… surtout le sein droit.
CLARA : Mais ça pouvait changer d’un moment à l’autre.
SWAN : Et monter en intensité…
Parce que je ne sais pas si c’était les positions ou le rythme ou nos respirations ou l’heure idéale mais, il y a eu ce moment précis où Avril, Clara, moi, tous les trois, on est devenu fusion.
Absolue.
CLARA : C’était si fulgurant que c’en était troublant. Ça nous a bouleversés.
(Silence). Ça m’a changée, aussi…
Et puis il y a eu la coupure des vacances et ça nous a fait chier. Trop long. Trop loin les uns des autres. On allait forcément se manquer.
SWAN : Heureusement, on s’était donné des exercices pour ne pas s’oublier !
CLARA : Jouir vite en pensant aux autres, se caresser longuement en retenant l’orgasme… savourer.
SWAN : Et quand on s’est retrouvés fin août, ce qui est sûr, c’est qu’on avait pris de plus en plus d’assurance. Oui, je trouve pas autre chose à dire pour expliquer que je suis arrivé un soir avec une page déchirée dans un magazine : « Faut-il briser le tabou du doigt dans les fesses »… Avril a réagi aussitôt « Ça non ! Mais alors franchement non ! Qu’on essaye de me mettre un doigt dans le cul ou quoique ce soit, tiens ! Je pourrais… enfin, c’est pas mon truc ! ». Clara a éclaté de rire mais sans donner son avis. Et j’ai soufflé : « Ben… ça me plairait bien moi… enfin, si c’est pour la science, je veux bien me sacrifier ! »
CLARA : Ça aurait pu durer des mois et des mois encore. Personne pour se douter de ce qu’on vivait. Surtout pas les familles, surtout pas mes parents. Jamais je leur avais parlé d’un mec, alors d’une fille… et en trio, en plus ! Oui, ça aurait pu durer encore même si on savait que maintenant, en terminale, on allait avoir moins de temps. Puis, il y a eu ce truc qui nous est tombé dessus et qui a tout fait exploser. C’était fin septembre…
SWAN : Clara était entre les jambes d’Avril, la langue plus précise que jamais. Avril me caressait le sexe et ma langue à moi parcourait ses seins. Une nouvelle fois on était complètement partis ailleurs.
CLARA : Alors on n’a pas entendu le bruit dans l’escalier, pas entendu la clé dans la serrure, on n’a pas vu la porte s’ouvrir. Mais ce qu’on a vu, c’est un homme qui nous regardait fixement les yeux écarquillés. J’ai hurlé.
SWAN : Le gars est resté en plan. Il a juste lâché : « Mais qu’est-ce que vous foutez là ? ». On ne savait pas qui c’était mais Avril s’est levée, complètement nue, et lui a demandé de sortir. Direct. Moi, j’étais tétanisé. Super gêné. D’instinct, j’avais remonté la couette sur Clara. Sur moi aussi !
CLARA : Ma sœur avait décidé de sous-louer son studio et je n’étais pas au courant.
SWAN : Louer entièrement meublé. Draps compris.
10.
CLARA : On n’en a pas reparlé pendant plusieurs jours. Je ne sais pas si c’était de la peur, de la colère ou de la honte…
SWAN : Je crois même qu’on s’est un peu évités. Juste le temps de se remettre les idées en place, d’être raccord avec ce qui s’était passé. Mais c’est Avril qui a pointé la bonne question. Après un court de philo. La vraie bonne question…
CLARA : « Et on le fait où maintenant ? »
SWAN : Ce qu’on ne savait pas, c’est qu’on ne referait jamais l’amour avec elle.
(Bruits du restaurant qui reviennent.)
CLARA : Avril nous a annoncé son départ. Imminent. Pour Taïwan.
SWAN : Son départ.
CLARA : On savait qu’elle pouvait partir avec ses parents du jour au lendemain. Mais après tout ce qui s’était passé, tout ce qu’on avait vécu… on avait oublié.
SWAN : Sans doute c’était désespéré mais, sur le moment, on a essayé de voir s’il n’y avait pas une autre solution. Si c’était inévitable. On a bien essayé de la retenir. Coûte que coûte.
CLARA : Et puis on a vu la tristesse dans ses yeux. Évidemment c’était pas aussi simple. Pour nous, pour elle surtout. Mais : « Tout va bien, vous inquiétez pas, tout va bien. ».
SWAN : Elle cherchait à nous rassurer… et c’était raté. On a pleuré tous les trois au même moment. Elle nous a enlacés, presque trop fort : « Merde, vous allez vraiment me manquer ». Et, au fond, je crois que ça voulait dire : »Merde, je vous aime vraiment « .
CLARA : Là, j’ai compris qu’on ne serait plus jamais trois, qu’on ne verrait plus Avril. Et là, d’un coup, on basculait dans les sentiments…
SWAN : Et ça faisait chier. On ne coucherait plus jamais ensemble, OK, mais cet attachement… on l’avait pas prévu.
Alors s’attacher c’était souffrir ?
CLARA : On avait parlé, parlé, parlé de sexe, de ce qu’on aimait, de ce qu’on n’aimait pas, mais est-ce qu’on avait parlé de nous trois ? De ce qu’on vivait dans nos têtes ?
SWAN : On ne s’était pas posé la question. Il n’avait jamais été question d’amour entre nous. Alors il fallait qu’elle parte pour qu’on s’en rende compte ?
CLARA : Avril, elle trouverait toujours à aimer ailleurs…
SWAN : Mais nous, on resterait là.
CLARA : Comme deux cons.
SWAN : Parce que, sans Avril, qu’est-ce qu’on allait faire de nous…
CLARA : Est-ce qu’on aurait toujours envie l’un de l’autre, sans elle ? C’est elle qui avait mis le feu aux poudres entre nous, non ?
11.
CLARA : « Je ne veux personne le jour de mon départ »… Donc, c’était pas des paroles en l’air.
SWAN : Mais on est venus quand même. Avoue, c’est peut-être une façon de la garder encore un peu.
(Silence)
CLARA : Alors on pensera toujours à elle quand on sera tous les deux… On sera ensemble par défaut.
SWAN : Eh, tu sais quoi ? On a qu’à dire qu’on n’est pas venus pour Avril. Ce soir, on serait venus pour nous, juste pour nous. Suffirait de se dire bonjour, bonsoir, comme n’importe qui. Enfin, je ne sais pas, un truc qui se fait quand on ne se connaît pas.
(Silence)
CLARA : Sérieusement ? !
SWAN : Sérieusement.
(Silence)
CLARA : Très bien… Alors… Bonjour, je suis Clara…
SWAN : Enchanté. Swan !
CLARA : Vous n’auriez pas vu une fille qui s’appelle Avril ?
SWAN : Non. Enfin, si… vous l’avez loupée de peu. Elle m’a parlé d’un Tour du Monde, je crois.
CLARA : Un Tour du Monde ? C’est sérieux un Tour du Monde.
SWAN : Un Tour du Monde pour toujours, en plus. Et la consigne, c’est d’oublier d’être tristes.
CLARA : Alors ça vaut bien une crème brûlée…
SWAN : Carbonisée, même.
CLARA : Va falloir s’y faire, à nos goûts bizarres… et à nos tête-à-tête… parce qu’on ne va pas se quitter… hein ? On ne va pas se quitter…
SWAN : Mais non, bien sûr que non… ! Seulement on se connaît maintenant, et beaucoup. Oh, ça fout la trouille…
CLARA : Ça fout carrément la trouille !
SWAN : Heureusement, t’as un manuel pour les sentiments ?
CLARA : Je crois pas… vraiment pas.
SWAN : Ou un livre avec de la littérature, sinon ? Ils sont très forts, les auteurs morts, pour que ça dure des pages avant de se dire qu’on s’aime.
CLARA : Parce que tu m’aimes ? !
(Silence)
SWAN : En tout cas on n’est plus copains, et peut-être pas simplement amants…
Et tout ce qui va nous arriver maintenant… Enfin, je compte bien apprendre.
CLARA : On va s’apprendre, Swan. Et puis ça continuera d’être aussi joli entre nous…
Version Avril 2022
©Cathy Ytak
©Thomas Scotto